Si vous aussi vous avez déjà eu l’impression de perdre votre public en vous emmêlant les pinceaux, cet article est fait pour vous ! Nous avons tous besoin d’un fil rouge autour duquel nos mots gravitent et circulent. Un discours efficace est un discours organisé autour d’un seul objectif avec un cœur de message précis et adapté à votre auditoire.
Beaucoup d’orateurs ont tendance à se jeter dans l’écriture de leur discours en s’interrogeant uniquement sur la pertinence du contenu par rapport au sujet donné. Or, l’écueil est justement là. Se jeter trop rapidement dans l’écriture d’une prise de parole ou la préparation d’un power point, c’est négliger les particularités de votre public, de votre message, du contexte et de votre objectif. Il se peut alors qu’une fois devant votre public, votre discours ne semble plus du tout adapté et précis. Pour éviter cela, nous vous conseillons plutôt de prendre le temps de vous poser les bonnes questions, avant de vous lancer dans la rédaction. Cela vous permettra de proposer à votre public une prise de parole personnalisée et donc convaincante.
1.Qui est mon auditoire ?
Cette question semble relever du b.a-ba et pourtant, elle est encore trop souvent négligée. Se poser la question du Qui ne consiste pas seulement à déterminer vaguement les fonctions professionnelles du groupe qui vous fait face. Il s’agit bien plutôt d’identifier les sources et les motivations de leur présence devant vous.
Voici une liste de questions auxquelles vous gagnerez à répondre :
- De quelle(s) entreprise(s) ou entité(s) viennent-ils ?
- Se connaissent-ils entre eux ?
- Leur participation se fait-elle sur la base du volontariat ?
- Quel est leur niveau de connaissance du sujet ?
- Depuis combien de temps sont-ils à l’écoute d’orateurs ?
- Ont-ils potentiellement un point de vue et des convictions sur votre sujet ? Lesquels ?
- Quelles questions les membres de votre auditoire se posent-ils sans doute ? Comment y répondre ?
Ces questions sont primordiales (rien que ça !) pour structurer un discours efficace. Par exemple, si les membres de mon public se connaissent entre eux, je peux utiliser des questions interactives dès le début de mon discours pour briser la glace et créer un climat de confiance. En effet, ils n’auront à priori aucune ou peu de difficultés à prendre la parole les uns devant les autres pour répondre à mes questions puisqu’ils se connaissent déjà. À l’inverse, il y a peu de chance que des participants qui ne se sont jamais vus répondent avec entrain à mes questions introductives. Vous risquez donc davantage de vous transporter en Sibérie et de subir de plein fouet le plus grand vent de la planète !
En vous posant ne serait-ce que cette seule question de la camaraderie de vos auditeurs en amont de la préparation de votre discours, vous pouvez sauver votre accroche ! Au cas où vous ne seriez pas encore convaincus de la nécessité de se poser ces questions préalables, voici un autre exemple. Celui-ci sera participatif, histoire de changer un peu 😉
Nous vous proposons de vous plonger dans la situation suivante : vous êtes devant un public de jeunes sortants d’écoles. Vous êtes là pour les convaincre de vous déposer leur CV, votre objectif étant de recruter deux nouveaux apprentis. Il est 11h30. Vos auditeurs sont assis depuis 9h et ont vu passer sur scène trois autres entreprises du même secteur. Vous démarrez votre présentation bien rodée, celle que vous faites depuis maintenant 4 années consécutives. Un participant (à priori plus courageux que les autres) lève la main sans que vous l’y ayez invité et vous pose la question suivante : “savez-vous que la concentration d’un auditoire baisse considérablement après 2 heures d’attention inactive ?”.
Comment réagissez-vous ? Très honnêtement, ce participant aurait totalement raison de vous notifier cela, car lui et ses camarades auraient légitimement l’impression de n’être que de simples pions posés là, à écouter un dédale de présentations sans être pris en considération. Or, si vous vous étiez posé la question “depuis combien de temps mes auditeurs sont inactifs ?” en amont de la préparation de votre discours, vous auriez peut-être eu l’idée de leur proposer une petite pause avant de commencer, quitte à perdre un peu de temps de parole pour gagner en temps d’attention. Vous auriez peut-être également songé à débuter votre présentation par un jeu, ou un quizz. Vous auriez enfin peut-être choisi de faire une blague sur la difficulté de rester à l’écoute aussi longtemps, ou bien de verbaliser votre faim et celle suggérée de votre public : “Nous avons tous extrêmement faim, c’est pour cela que je vais faire court !”.
Cette question du QUI? est bien plus une source d’idées que de contraintes. La négliger parce que nous croyons connaître l’auditoire par expérience ou habitude est un écueil à éviter. Cela peut vous induire totalement en erreur et votre discours risque de n’être ni ciblé, ni clair, ni porteur de sens pour votre public.
2.Pourquoi je viens parler ?
Que vous ayez choisi ou non de prendre la parole, il vous faut un objectif clair et précis pour vous ET pour vos spectateurs. Votre public se posera toujours la question suivante, consciemment ou inconsciemment : “Pourquoi cette personne vient-elle nous parler de ce sujet ?”. Plus votre objectif sera clairement identifié et identifiable, plus votre public sera enclin à vous écouter.
Votre objectif peut être double : l’objectif explicite et le but implicite. Par exemple, l’objectif explicite de votre discours auprès de jeunes sortants d’école peut-être de présenter votre structure alors que votre but implicite est de recruter. Il est important de préparer votre discours en vous concentrant uniquement sur votre but implicite car c’est celui pour lequel vous vous engagerez physiquement dans vos propos (voir article “Comment utiliser son corps pour captiver son auditoire”).
Ainsi, si l’on reprend l’exemple précédent, le meilleur verbe d’action pour qualifier votre objectif sera : “donner envie”.
Voici une liste non-exhaustive d’autres objectifs possibles :
- Informer
- Expliquer
- Sensibiliser
- Former
- Convaincre
- Persuader
- Pousser à l’action
Un objectif peut être formulé en une phrase simple : “Je réussirai mon discours si…”, “Je veux que mon public retienne…”, “Je veux que mon public fasse… suite à mon discours”. Ayez un objectif SMART : spécifique, mesurable, atteignable, réaliste et temporellement défini.
C’est à partir de cette phrase clé que vous allez pouvoir déterminer les ingrédients de votre discours. Si je souhaite que 3 alternants minimum déposent leur CV à la fin de mon discours, dois-je passer plus de temps sur le contexte, le problème (y en a-t-il un d’ailleurs?), les bénéfices ou les étapes à venir ?
Il semblerait que mon message clé soit plutôt orienté autour des bénéfices que peut apporter mon entreprise, pour donner envie aux étudiants de nous rejoindre. Inutile donc de passer les ¾ de mon temps a donné des chiffres clés de l’entreprise ; le discours peut être davantage orienté sur les sujets de la qualité de vie au travail, des parcours réussis et inspirants de certains salariés, des séminaires organisés et de la réputation de l’entreprise.
Voici quelques exemples de discours où l’objectif est clairement identifié et identifiable, avec une structuration organisée autour d’un seul objectif. Faites l’exercice de formuler l’objectif de chacun de ces discours en une phrase simple et SMART :
- Discours d’Obama, “Yes We Can”: https://youtu.be/ueMNqdB1QIE
- Prise de parole de Kylian Mbappé après sa nomination en tant que capitaine de l’équipe de France : https://www.dailymotion.com/video/x8je25c
- Interview de Stromae au JT de TF1 dans le cadre de la sortie de son nouveau titre “l’enfer” : https://www.youtube.com/watch?v=bGmH_V18zxQ
Une fois le public identifié et l’objectif défini, nous pouvons commencer à nous pencher sur le contenu de notre discours.
3.Quels sont mes trois messages clés ?
La règle de trois est bien connue : le cerveau humain retient difficilement plus de 3 informations à la fois. Des études ont montré que les participants d’une formation, par exemple, peuvent retenir jusqu’à 90% de l’information présentée s’ils la pratiquent immédiatement, mais seulement 25% si elle est présentée de manière passive et sans pratique ultérieure. Or, de nombreuses prises de parole se font face à un public assis et passif (la conférence, la réunion, certaines formations, les webconférences…).
Il n’est donc pas nécessaire ou pertinent de chercher absolument à tout dire ! Voltaire lui-même disait “Le secret d’ennuyer est de vouloir tout dire”. Nous vous conseillons plutôt de cibler les passages de votre discours nécessaires à l’atteinte de votre objectif.
Voici la liste des ingrédients présents dans tout discours traditionnel :
- L’introduction (ou l’accroche)
- Le contexte
- Le problème
- La solution
- Les bénéfices
- Les réalisations déjà faites
- Les réalisations à venir
- La conclusion (ou l’appel à l’action)
En fonction de votre objectif et du temps de présentation dont vous disposez, il n’est pas toujours opportun de reprendre l’ensemble de ces ingrédients. Si nous prenons une nouvelle fois l’exemple des étudiants que nous souhaitons recruter en alternance, une mise en contexte rapide, puis un étalage des bénéfices, des réalisations déjà faites et des réalisations à venir sont les ingrédients qui paraissent les plus pertinents.
Lorsque vous vous lancez dans cette étape, vous pouvez suivre la marche suivante :
- Écrivez en gros, en gras et en couleur votre objectif en haut d’une feuille blanche
- Notez ensuite toutes les idées qui vous passent par la tête, sans restriction
- Pour chacun des points notés, complétez la phrase suivante : “cet élément est indispensable à l’atteinte de mon objectif car…”
- Éliminez les idées pour lesquelles vous ne parvenez pas à compléter la phrase ci-dessus
- Rédigez plus en détails les éléments que vous souhaitez garder en les rangeant dans trois grands paragraphes
- Soignez votre introduction en y annonçant tout de suite votre objectif de manière subtile
- Soignez votre conclusion en y répétant, toujours subtilement, votre objectif
Cette méthode peut paraître un peu procédurière de prime abord, mais elle est une bonne trame à suivre pour s’entraîner à “dire plus en disant moins”. N’ayez pas peur d’afficher clairement votre ligne directrice. Votre auditoire préfèrera toujours l’honnêteté et l’authenticité aux tournures de phrases mensongères et démagogues.
Nous avons ouvert ici la porte du contenu du discours. Dans le système éducatif français, c’est un chapitre qui est bien plus souvent abordé que celui du corps. Dans nos formations, les deux dimensions sont interconnectées et en synergie. Il semble nécessaire de réfléchir de manière systémique à notre discours en identifiant tout autant les mots les plus percutants, que les gestes et les mouvements qui les accompagnent (voir article Comment utiliser son corps pour captiver son auditoire). Dans un prochain article, nous détaillerons la manière dont on peut transmettre ses messages clés : quel vocabulaire, quel niveau de langage, quelle tournure de phrase, quel registre et quel ton. Stay tuned !